Jeanneke-Pis fut conçue en 1985 par feu Denis Adrien Debouvrie. Il était alors propriétaire d’immeubles situés « Impasse de la Fidélité », au cœur de l’Ilot Sacré, dans le centre historique de Bruxelles. Soucieux de ramener du monde dans cette impasse qui ne suscitait plus beaucoup d’intérêts, il eut l’idée de créer une statue-fontaine en bronze d’environ 50 cm et représentant une petit fille qui « pisse », égal féminin du célèbre Manneken-Pis. Denis A. Debouvrie se serait inspiré de sa sœur, Jenny, de quelques années sa cadette et dont il était très proche pendant leur enfance dans la Flandre Orientale des années 1940.
Denis A. Debouvrie aurait aussi souhaité rétablir l’égalité homme femme en donnant vie et naissance à la sœur de Manneken-Pis.
Il chargea une sculptrice de réaliser la statue dont il avait conçu le modèle. Exemplaire unique, Jeanneke-Pis s’installa dans une niche au-dessus d’une vasque, aménagée dans la façade d’un immeuble au fond de l’Impasse de la Fidélité, au numéro 10 précisément.
Plusieurs événements d’inauguration eurent lieu en juin 1987. D’abord avec le bourgmestre de la ville de Bruxelles de l’époque et le président des amis de Manneken-Pis, témoignage sans ambiguïté de la bonne relation qui prévalait et de l’accueil favorable réservé à Jeanneke-Pis. La seconde inauguration, plus sulfureuse, fut organisée en présence de la Cicciolina. Cette femme politique italienne, élue députée cette année-là, était aussi une actrice du porno qui avait pour habitude de montrer ses seins lors de ses apparitions, illustrant ainsi une évidente légèreté et un certain naturisme de circonstance.
Une statue-fontaine ne laisse jamais les passants insensibles et très vite la vasque d’eau devant elle se mit à se remplir de pièces de monnaie jetées par les chalands. Ces petites pièces ont permis de créer la même année l’ASBL Horizon-Espoir, association ayant pour but de verser les pièces récoltées par Jeanneke-Pis à la lutte et à la recherche d’un traitement contre le SIDA, maladie qui est apparue en 1981, avec une stigmatisation des malades très pesante. Aucun traitement n’était reconnu efficace à l’époque où la mascotte féminine de Bruxelles s’est mise à « pisser » effrontément dans sa vasque.
Avec une statue nait généralement une légende, celle de Jeanneke-Pis promet fidélité aux amoureux qui y jetteront une pièce. Ainsi naissent les légendes ; des histoires passées, sorties de leur contexte, auxquelles on ne pourra plus jamais porter toute la vérité d’antan…
En 2003, l’Impasse de la Fidélité attira particulièrement l’attention d’entrepreneurs. Ils y installèrent le « Delirium Café », devenu réputé internationalement pour l’étendue de sa carte de bières. De nombreux autres établissements se sont installés pour finalement arriver à la vision que Denis A. Debouvrie avait de cette impasse : un lieu incontournable dans le centre de Bruxelles, une rue de la soif et de la joie au bout de laquelle se trouve une espiègle et jolie petite fille de bronze.
Petit à petit la notoriété de Jeanneke-Pis s’est construite tant et si bien qu’elle est, à ce jour, un passage incontournable lors d’une visite à Bruxelles.
Décédé en décembre 2008, Denis A. Debouvrie n’a malheureusement pas pu apprécier longtemps le succès de son oeuvre, laissant ainsi Jeanneke-Pis orpheline mais pour un temps seulement…
Depuis son décès, les sommes récoltées dans la vasque de la statue-fontaine ont continué d’être versées à divers fonds et associations tels que le FNRS et UNICEF.
Les deux neveux de Denis A. Debouvrie, les « cousins symboliques » de Jeanneke, écrivent à présent la suite de l’histoire. Celle d’une petite statue devenue grande, aujourd’hui symbole et légende des pavés et murmures de sa capitale.
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